La cotitularité du bail des époux est légale et de plein droit. Elle n'implique aucune formalité. Les époux ne peuvent l'exclure s'ils cohabitent ou ont cohabité un temps dans le logement. Le bailleur ne peut la méconnaître s'il n'ignore pas la situation de famille du signataire du bail.
Elle réalise une exception au principe que le signataire du bail est seul titulaire des droits que confère le contrat de bail et seul débiteur des obligations qu'il crée en contrepartie.
La règle résulte formellement de l'article 1751 du code civil, selon lequel le droit au bail du local servant à l'habitation effective des époux est réputé appartenir à l'un et l'autre, quel que soit leur régime matrimonial et quand bien même le bail aurait été souscrit avant le mariage.
Selon le même texte, complété en 2014 par la loi ALUR, le droit au bail des partenaires pacsés appartient de la même manière à l'un et l'autre, mais si le bail est antérieur au pacte, à la condition qu'ils en aient fait la demande conjointement (par courrier recommandé avec accusé de réception) auprès du bailleur qui ne saurait le refuser.
La jurisprudence a retenu aussi la cotitularité du titre d'occupation d'un logement de fonction attribué à l'un des époux (Civ, 3ème, 10 janvier 2007, n° 05-19914).
En cas de séparation du couple, divorce ou séparation de corps, le droit au bail est attribué à l'un ou l'autre par le juge, sous réserve des droits à récompense ou à indemnité au profit de l'autre époux. En cas de décès de l'un ou l'autre, le survivant dispose d'un droit exclusif sur le bail sauf s'il y renonce expressément. Une telle renonciation ne peut valablement intervenir avant le droit acquis, c'est à dire avant le décès du conjoint ou partenaire (Civ, 3ème, 18 mai 2011, n° 10-13853).
Le principe est bien établi en jurisprudence que les époux demeurent cotitulaires du bail portant sur le logement servant à l'habitation commune pendant toute la durée du mariage et jusqu'à la transcription du jugement du divorce en marge des registres de l'état civil. Ainsi que l'exprime l'article 262 du code civil, seule la transcription rend le divorce opposable aux tiers (Civ, 3ème, 9 février 2017 n° 15-26305 ; 22 octobre 2015, n° 14-23276). Il en va de même pour les partenaires, solidairement tenus jusqu'à la transcription de la dissolution du pacs. La séparation de fait, l'autorisation judiciaire de résider séparément, sont sans conséquence sur la titularité du bail.
Il a été jugé (Civ, 3ème, 23 mars 2011, n° 10-30495) que l'attribution, lors de la liquidation du régime matrimonial pour cause de divorce, du droit au bail à l'un des époux, ne constitue pas une cession de bail mais un partage. De ce fait, la clause du bail prévoyant l'accord du bailleur à la cession du bail est inopérante.
La question de l'opposabilité au bailleur de la cotitularité du bail lorsqu’un seul des époux en est signataire, notamment lorsque le mariage intervient après l'entrée dans les lieux, a été traitée successivement de deux manières différentes.
Dans un premier temps, la jurisprudence a retenu que les locataires n'avaient pas obligation d'informer le bailleur de leur mariage. La cotitularité légale du bail ne résultait que de la célébration du mariage et de la cohabitation dans le local loué. Il pouvait en découler des difficultés pratiques, en particulier pour les bailleurs.
La loi du 21 juillet 1994 sur l'habitat a introduit dans la loi du 6 juillet 1989 un article 9-1 selon lequel les notifications ou significations faites par le bailleur sont de plein droit opposables au partenaire lié par un pacte civil de solidarité au locataire ou au conjoint du locataire si l'existence de ce partenaire ou de ce conjoint n'a pas été préalablement portée à la connaissance du bailleur.
Cette disposition fait peser sur les locataires une obligation d'information du bailleur d'un lien matrimonial ou de partenariat conclu postérieurement à la signature du bail, la preuve de cette information du bailleur pesant sur le locataire (Civ, 3ème, 19 octobre 2005, n° 04-17039).
En conséquence de la cotitularité, les époux ou partenaires sont solidaires du paiement des loyers et des charges. La règle est aussi une déclinaison du principe posé à l'article 220 du code civil de solidarité des époux pour tous contrats ayant pour objet l'entretien du ménage ou l'éducation des enfants. Pour les partenaires liés par un pacs, c'est aussi une conséquence des principes posés à l'article 515-4 du code civil, selon lesquels ils s'engagent à une vie commune et sont tenus solidairement, sous certaines réserves, à l'égard des tiers des dettes contractées par l'un d'eux pour les besoins de la vie courante.
Le conjoint qui a quitté le domicile conjugal reste tenu solidairement envers le bailleur des loyers et des charges pour toute la période antérieure à la transcription de la décision de divorce en marge des registres de l'état civil (Civ, 3ème, 31 mai 2006, n° 04-16920 ; 2 février 2000, n° 97-18924 ; 27 mai 1998, n° 96-13543).
La cotitularité du bail des époux et partenaires est une solidarité légale. La communauté de vie n'en est pas une condition. L'un d'eux ne peut la refuser pour ne plus être tenu aux loyers. De ce fait, est sans effet tangible qu'un seul des époux ou des partenaires donne congé : l'auteur du congé reste solidairement tenu des loyers et l'autre reste locataire (Civ, 3ème, 19 juin 2002, n° 01-00652).
Toutefois, pour mieux protéger les victimes de violences conjugales, la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (loi ELAN) a créé un nouvel article 8-2 dans la loi du 6 juillet 1989, selon lequel le départ du logement de la victime de violences conjugales fait cesser la solidarité entre les locataires. Le législateur a cru bon, cependant, d'y mettre des conditions peu réalistes : la notification au bailleur par lettre recommandée avec copie de l'ordonnance de protection du juge ou de la condamnation pénale du conjoint ou partenaire. Ce n'est qu'à compter de cette notification que cesse la solidarité et seulement pour les loyers et charges venant à échéance ultérieurement.
La situation du couple vivant en union libre est différente. Si un seul est signataire du bail, l'autre n'a ni droit ni titre sur le local loué. L'union libre n'opère ni cotitularité ni solidarité légales. Seul le signataire du bail est tenu des loyers et charges. Si celui-ci quitte les lieux, l'autre n'a pas de titre pour s'y maintenir. Cette règle, toutefois, connaît deux aménagements.
En premier lieu, la cotitularité du bail est bien entendu acquise si les concubins sont l'un et l'autre signataires du bail, de la même manière que des colocataires. Mais à la différence de la cotitularité légale, la cotitularité conventionnelle n'implique pas automatiquement la solidarité. En effet, selon l'article 1310 nouveau du code civil (qui se substitue depuis la réforme de 2016 à l'ancien article 1202) la solidarité peut être légale ou conventionnelle mais ne se présume point. De ce fait, à défaut de solidarité légale, elle doit être expressément stipulée dans le bail par une clause ou une formulation assurant sans ambiguïté cette solidarité.
Si le bail comporte cette clause de solidarité, celui des colocataires qui quitte le logement et sauf accord conclu avec le bailleur et le ou les autres locataires, reste tenu des loyers, charges et réparations locatives.
Cependant, une disposition introduite par la loi ALUR à l'article 8-1 loi du 6 juillet 1989 consacré au contrat de colocation, précise que, sauf nouveau locataire, la solidarité conventionnelle à laquelle reste tenu le partant s'éteint au plus tard six mois après la date d'effet de son congé.
En second lieu, l'article 14 de la loi du 6 juillet 1989, prévoit qu’en cas d'abandon du domicile par le locataire, le contrat de bail se poursuit au profit non seulement du conjoint, du partenaire et des descendants, mais aussi au profit du « concubin notoire ». Selon le même texte, en cas de décès du locataire, le bail est transféré aux profit des mêmes, notamment au « concubin notoire ».
Les droits au bail du concubin notoire ne sont acquis que s'il vivait avec le signataire du bail depuis au moins un an à la date de l'abandon de domicile ou du décès et s'il peut faire la preuve par tous moyens de relations continues, stables et connues.
Si le logement a le caractère de logement social, le concubin notoire n'est pas astreint à justifier de conditions de ressources particulières. En revanche, dans le cas d'un logement soumis à la loi de 1948, le concubin notoire ne bénéficie pas d'un droit au maintien dans les lieux, sauf s'il s'agit d'une personne handicapée.
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