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La garantie légale de bon fonctionnement

  • camille7694
  • 19 août
  • 16 min de lecture
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Les principes de cette garantie légale sont les suivants, qui revêtent une certaine logique, à défaut d'être simples :

 

Aux termes de l'article 1792-2 du code civil, la responsabilité de plein droit du constructeur d'un ouvrage, c'est à dire son obligation légale de résultat, s'étend « aux dommages qui affectent la solidité des éléments d'équipement (...), mais seulement lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert ».

 

Les éléments d'équipements indissociables de l'ouvrage, installés lors de la construction, relèvent de la garantie décennale si leur défaillance rend l'ouvrage impropre à sa destination (article 1792, alinéa premier), à condition, bien entendu, que les désordres n'aient pas été apparents lors de la réception.

 

Les autres éléments d'équipement sont, quant à eux, couverts par la garantie légale de bon fonctionnement de l'article 1792-3 du code civil, mobilisable sans avoir à rapporter la preuve d'une faute à la charge du constructeur.

 

Par autres éléments d'équipement, il faut donc entendre :

 

-       Les éléments d'équipement adjoints à l'ouvrage lors de sa construction,

 

-       Dissociables de l'ouvrage,

 

-     Et affectés de désordres qui ne rendent pas l'ouvrage impropre à sa destination (auquel cas, c'est la garantie décennale qui s'applique).

 

Cette garantie légale est d'une durée minimale de deux années à compter de la réception de l'ouvrage. Ce délai est un délai de forclusion.

 

Si ces mêmes éléments d'équipement ont été adjoints à un ouvrage existant, et à moins qu'ils constituent un ouvrage en soi, seule la responsabilité contractuelle de droit commun peut trouver à s'appliquer, quelle que soit la gravité des désordres.

 

Selon l'article 1792-7 du code civil, ne sont pas couverts par les garanties légales, les éléments d'équipement professionnels, c'est à dire ceux dont « la fonction exclusive est de permettre l'exercice d'une activité professionnelle dans l'ouvrage ».

 

Le fabricant d'un élément d'équipement « conçu et produit pour satisfaire, en état de service, à des exigences précises et déterminées à l'avance » est solidairement tenu des garanties légales avec le constructeur qui a mis en place l'équipement sans modification et conformément aux règles édictées par ce fabricant (article 1792-4 du code civil).

 

L'assurance de garantie biennale n'est pas une obligation, à la différence de l'assurance décennale, mais est évidemment recommandée.

 

La garantie biennale de l'article 1792-3 du code civil est exclusive de la responsabilité contractuelle de droit commun. C'est à dire que si les conditions de cette garantie légale sont satisfaites, elle seule peut être mise en œuvre (jurisprudence ancienne et constante, notamment : Civ, 3ème, 11 mai 2022, n° 20-18.318).

 

Pour éclaircir cette suite logique, certaines notions doivent être précisées.

 

La notion d'élément d'équipement

 

La loi n'énonce pas une définition légale de la notion d'élément d'équipement. Une jurisprudence, qui ne découle pas précisément de la loi mais est bien établie, retient que seuls sont couverts par la garantie légale de bon fonctionnement, les éléments appelés à fonctionner, au sens mécanique du terme.

 

En conséquence, les équipements inertes ne relèvent pas de cette garantie légale. Le nombre des arrêts rendus, souvent de cassation et publiés par la Cour de cassation, témoigne d'une certaine réticence des cours d'appel à observer cette jurisprudence.

 

Ainsi, ne relèvent pas de la garantie biennale, par exemple :

 

            Les tissus tendus et moquettes (Civ, 3ème, 30 novembre 2011, n° 19-70.345, Publié) ;

 

            Les dallages (Civ, 3ème, 13 février 2013, n° 12-12.016, Publié) ;

 

            Un carrelage (Civ, 3ème, 11 septembre 2013, n° 12-19.483, Publié) ;

 

            L'insuffisance de végétation d'une toiture terrasse végétalisée (Civ, 3ème, 18 février 2016, n° 15-10.750, Publié) ;

 

            Un enduit de façade « qui constitue un ouvrage lorsqu'il a une fonction d'étanchéité, ne constitue pas un élément d'équipement, même s'il a une fonction d'imperméabilisation, dès lors qu'il n'est pas destiné à fonctionner » (Civ, 3ème, 13 février 2020, n° 19-10.249) ;

 

            Des cloisons (Civ, 3ème, 13 juillet 2022, n° 19-20.231, Publié) ;

 

            Des éléments rapportés de menuiserie (Civ, 3ème, 7 juin 2018, n° 16-15.803).

 

Les désordres affectant ces éléments d'équipement inertes, c'est à dire qui ne fonctionnent pas, relèvent, sauf s'ils affectent la solidité de l'ouvrage ou le rendent impropres à sa destination, de la responsabilité contractuelle de droit commun.

 

A titre d'exemples d'élément d'équipement pouvant relever de la garantie biennale, on peut citer :

 

            Un élément d'équipement contre l'incendie (Civ, 3ème, 19 juin 1991, n° 89-19.671) ;       

 

            Des vérins de fenêtre (Civ, 3ème, 20 mars 2002, n° 99-20.022) ;

 

            Un ballon d'eau chaude (Civ, 3ème, 29 mars 2011, n° 10-14.540) ;

           

            Des volets roulants (Civ, 3ème, 20 juin 2012, n° 11-16.970) ;

 

            Un câblage informatique (Civ, 3ème, 14 décembre 2022, n° 21-16.377).

 

Les éléments d'équipement dissociables ou indissociables de l'ouvrage

 

Les désordres affectant un élément d'équipement (qui a pour propriété de fonctionner) installé sur l'ouvrage lors de sa construction, relèvent :

 

            De la garantie décennale, s'il s'agit d'un équipement indissociable de l'ouvrage, et si la défaillance a pour effet de rendre cet ouvrage impropre à sa destination ;

 

            De la garantie biennale, s'il s'agit d'éléments dissociables de l'ouvrage dont les désordres ne rendent pas l'ouvrage impropre à sa destination.

 

Aux termes de l'article 1792-2, alinéa 2, du code civil, l'élément d'équipement est indissociable de l'ouvrage « lorsque sa dépose, son démontage ou son remplacement ne peut s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de cet ouvrage ». Cette définition relève d'un certain bon sens et permet, par a contrario, de définir l'élément d'équipement dissociable. Évidemment, les circonstances de fait sont diverses et la solution, dissociable ou indissociable, peut susciter une hésitation.

 

Ainsi, l'arrêt d'une cour d'appel qui avait retenu qu'un bardage, à vocation thermique et de ravalement, constitué par des plaques placées sur des rails fixés aux façades constituait un élément d'équipement indissociable du bâtiment au sens des dispositions de l'article 1792-2 du code civil, est cassé car il aurait dû être recherché si le démontage ou le remplacement de cet équipement pouvait ou non s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière des ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert et si les dommages qu'elle relevait compromettaient la solidité de l'ouvrage ou le rendaient impropre à sa destination (Civ, 3ème, 22 octobre 2088, n° 07-15.214, Publié). 

 

Dans une autre espèce, la Cour de cassation reproche à une cour d'appel qui avait retenu que relevait de la garantie biennale, un élément d'équipement superficiel de protection qui ne faisait pas indissociablement corps avec la structure, sa réparation n'impliquant pas la démolition du dallage ou du plancher, et pouvant se faire avec une chape rapportée, de s'être fondée sur les modalités de réparation, sans rechercher si la dépose, le démontage ou le remplacement de la dalle pouvait s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière des ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert (Civ, 3ème, 28 octobre 2003, n° 02-14.589).

 

Sont un élément d'équipement dissociable de l'ouvrage, et ne peuvent donc relever de la garantie décennale, des canalisations fixées au mur et non encastrées dans la maçonnerie (Civ, 3ème, 9 juillet 2013, n° 12-18.312).

 

Encore faut-il, pour écarter la garantie décennale et retenir la seule garantie biennale, non seulement vérifier que les éléments d'équipement en cause sont bien dissociables de l'ouvrage, mais encore, si cela était demandé, rechercher si les désordres affectant ces éléments d'équipement ne rendaient pas l'ouvrage impropre à sa destination (Civ, 3ème, 12 juin 1991, n° 90-12.171, Publié).

 

Les éléments d'équipement installés sur un ouvrage existant

 

En principe, les désordres affectant des éléments d 'équipement installés sur existant, ne relèvent pas des garanties légales, mais seulement de la responsabilité contractuelle du constructeur.

 

Mais, dans certaines circonstances, les juges peuvent paralyser la règle en retenant, de manière plus ou moins arbitraire, que l'élément d'équipement en cause constitue un ouvrage en soi, relevant donc des garanties légales.

 

La Cour de cassation énonce donc que « si les éléments d'équipement installés en remplacement ou par adjonction sur un ouvrage existant ne constituent pas en eux-mêmes un ouvrage, ils ne relèvent ni de la garantie décennale ni de la garantie biennale de bon fonctionnement, quel que soit le degré de gravité des désordres, mais de la responsabilité contractuelle de droit commun, non soumise à l'assurance obligatoire des constructeurs ». Dans cette affaire, un insert de cheminée installé sur existant était à l'origine d'un incendie ayant détruit la maison, et la cour d'appel avait approuvé, à tort donc, la mise en œuvre de la responsabilité décennale (Civ, 3ème, 21 mars 2024, n° 11-18.694, Publié). 

 

Dans une espèce en tous points identique, la Cour avait jugé le contraire, c'est à dire que relève de la responsabilité des constructeurs de l'article 1792 du code civil, le désordre affectant un insert qui avait causé un incendie ayant intégralement détruit une habitation, de sorte qu'il importait peu que l'insert eût été dissociable ou non, d'origine ou installé sur existant (Civ, 3ème, 7 mars 2019, n° 18-11.741, Publié).

 

En effet, par l'arrêt du 21 mars 2024, la Cour est revenue, dans le souci allégué d'une simplification, à une jurisprudence ancienne (notamment : Civ, 3ème, 18 janvier 2006, n° 04-17.888, Publié ; Civ, 3ème,  10 décembre 2003, n° 02-12.215, Publié), qu'elle avait abandonnée en 2017 pour retenir que l'élément d'équipement installé sur existant relève des garanties légales lorsque les désordres qui l'affectent rendent l'ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination (Civ, 3ème, 15 juin 2017, n° 16-19.640, Publié ; Civ, 3ème, 14 septembre 2017, n° 16-17.323, Publié : « les désordres affectant des éléments d'équipement, dissociables ou non, d'origine ou installés sur existant, relèvent de la responsabilité décennale lorsqu'ils rendent l'ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination »).

 

Cette jurisprudence de 2017, pourtant confirmée par plusieurs arrêts, est donc obsolète depuis le revirement opéré par l'arrêt du 21 mars 2024. Désormais, comme avant 2017, les désordres affectant les éléments d'équipement installés sur existant ne relèvent que de la responsabilité contractuelle de droit commun, quelle que soit la gravité des désordres, sauf si ces éléments d'équipement constituent un ouvrage en soi.

 

S'est ainsi développée une casuistique, découlant de circonstances considérées de manière assez impressionniste, la Cour de cassation laissant parfois (mais pas toujours) aux cours d'appel une certaine marge de liberté au nom de l'appréciation souveraine des faits matériels.

 

S'agissant d'éléments d'équipement installés sur un ouvrage existant et constituant un ouvrage en soi, ouvrant droit, pour le maître de l'ouvrage, aux garanties légales, on peut citer, à titre d'exemple, l'installation sur un ouvrage existant d'un système de climatisation par pompe à chaleur immergée au fond d'un puits en contact avec la nappe phréatique (Civ, 3ème, 24 septembre 2014, n° 16-19.615). Dans le même sens pour une installation de climatisation de grande ampleur : Civ, 3ème, 28 janvier 2009, n° 07-20.891). Il semble que les juges soient sensibles à la dimension, voire au coût de l'équipement installé sur l'existant. En effet, l'installation d'une simple pompe à chaleur n'est pas un ouvrage en soi (Civ, 3ème, 4 mai 2016, n° 15-15.379).

 

Les éléments d'équipement à vocation exclusivement professionnelle

 

L'ordonnance n° 2005-658 du 8 juin 2005 portant modification de diverses dispositions relatives à l'obligation d'assurance dans le domaine de la construction et aux géomètres experts, a créé l'article 1792-7 du code civil pour écarter du camp des garanties légales les éléments d'équipement dont la fonction exclusive est de permettre l'exercice d'une activité professionnelle, validant ainsi une jurisprudence constante qui entendait réserver aux particuliers et consommateurs les bénéfices des garanties légales (par exemple : Civ, 3ème, 22 juillet 1998, n° 95-18.415, Publié).

 

Toutefois, la précaution de la loi de limiter l'exclusion aux seuls éléments d'équipement dont l'utilité est exclusivement professionnelle, laisse dans le champ de la garantie légale les éléments d'équipement qui assurent l'habitabilité de l'ouvrage.

 

Il a pu être ainsi jugé que des panneaux photovoltaïques installés sur une toiture ne caractérisent pas un équipement de production industrielle d'énergie, comme la cour d'appel l'avait retenu, mais participent de la réalisation de l'ouvrage de couverture dans son ensemble, en assurant une fonction de clos, de couvert et d'étanchéité du bâtiment (Civ, 3ème ; 21 septembre 2022, n° 21-20.433, Publié).

 

De plus, les juges contournent parfois la règle de l'article 1792-7, en retenant qu'un élément d'équipement caractérise, par son ampleur et son coût, un ouvrage en soi, ne relevant pas de la garantie biennale, mais de la décennale. Toutefois, la Cour de cassation n'hésite pas à substituer son appréciation laconique à celle de la cour d'appel, ce qui rend difficile de percevoir des lignes directrices.

 

Ainsi, on peut lire dans un arrêt Civ, 3ème, 17 décembre 2020, n° 19-14.374 : « Pour condamner les sociétés [...] à payer certaines sommes à la société [...], l'arrêt retient que la centrale frigorifique installée dans l'usine comprend des chambres froides, des appareils techniques divers et complexes qui occupent plusieurs locaux de l'usine et sont reliés à des armoires électriques, qu'ils sont également raccordés entre eux par un réseau d'importantes canalisations qui traversent les cloisons des locaux pour desservir des lieux distincts et sont fixées à l'ossature métallique de l'immeuble par des points d'ancrage et que, même si certaines machines sont seulement posées au sol, cet ensemble technique, relié dans ses différentes composantes, doit être, compte tenu de son importance et de sa technicité, qualifié d'ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil. En statuant ainsi, alors que l'installation atteinte de désordres ne relevait pas des travaux de construction faisant l'objet de la garantie légale, la cour d'appel a violé le texte susvisé ». Impossible, donc, de savoir ce qui n'allait pas dans la motivation, à première vue impeccable, de la cour d'appel.

 

A l'inverse, par arrêt du 19 janvier 2017 (n°15-25.283, Publié), la Cour a, sans concéder beaucoup d'explication, cassé un arrêt de cour d'appel qui avait retenu qu'une conduite métallique d'adduction d'eau sur plusieurs kilomètres à une centrale électrique est un équipement ayant pour fonction exclusive de permettre la production d'électricité à titre professionnel et que sa construction ne pouvait donc faire l'objet des garanties légales, alors qu'il s'agissait d'un ouvrage en soi.

 

La Cour peut aussi procéder, de manière imprévisible, par nature d'équipement. Ainsi, elle a retenu que le câblage informatique de l'immeuble de la CPAM du Rhône « avait pour vocation le transport de signaux électriques d'un équipement électronique à un autre, en dégradant au minimum le signal, et que les prises numériques qui y étaient associées avait pour but de mettre en fonctionnement les équipements ainsi reliés, la cour d'appel en a exactement déduit que l'installation numérique, qui n'était pas inerte, relevait de la garantie biennale de bon fonctionnement », écartant ainsi le jeu de l'article 1792-7 du code civil (Civ, 3ème, 14 décembre 2022, n° 21-19.377).

 

Les désordres : la ligne de partage entre désordre biennal et désordre décennal

 

On rappellera que pour relever de la garantie légale, les désordres ne doivent pas avoir été apparents lors de la réception de l'ouvrage.

 

Si ces désordres étaient apparents mais n'ont pas été réservés, le maître de l'ouvrage est privé des garanties légales, et ne peut agir que sur le fondement de la garantie contractuelle pour faute prouvée.

 

Si ces désordres étaient apparents et ont été réservés, ils ne relèvent que de la garantie de parfait achèvement.

 

On rappellera aussi cette évidence qu'est applicable à la garantie de bon fonctionnement comme à la garantie décennale, la règle générale selon laquelle les désordres en litige, dont la cause exacte importe peu, doivent cependant découler des travaux réalisés par l'installateur.

 

En jurisprudence, la question est souvent débattue de savoir si les désordres en cause relèvent de la garantie biennale ou de la décennale. La Cour de cassation rappelle souvent aux juges du fond qu'ils doivent impérativement, si cela leur est demandé, rechercher si les désordres affectant les éléments d'équipement ne rendent pas l'ouvrage lui -même impropre à sa destination, auquel cas la garantie décennale du constructeur se trouve engagée. La défaillance d'un élément d'équipement, même si cet équipement correspond en tous points à la définition légale, peut engager non pas la responsabilité biennale du constructeur, mais sa responsabilité décennale.

 

En d'autres termes, il n'existe pas de seuil minimal de gravité pour un dommage biennal, mais un seuil maximal de gravité, qui est celui du dommage décennal.

 

Ainsi, par exemple :

 

Les défaillances d'un "liner" ayant pour conséquence de faire échec à sa fonction essentielle d'étanchéité du bassin et de rendre l'ouvrage (la piscine) impropre à sa destination, la cour d'appel, qui n'avait pas à rechercher si cet élément d'équipement était ou non indissociable de la piscine, en a déduit à bon droit que la présomption de responsabilité de l'article 1792 était applicable (Civ, 3ème, 5 juillet 2011, n° 10-19.274).

 

Les désordres touchant l'installation "domotique" d'un groupe d'immeubles, bien qu'affectant un élément d'équipement dissociable au sens de la loi, relevaient de la garantie décennale dès lors que ces désordres rendaient l'ouvrage principal impropre dans son ensemble à sa destination (Civ, 3ème,  26 février 2003, n° 01-14.352, Publié).

 

Les désordres affectant un système d'assainissement par fosse septique rendent l'immeuble impropre à sa destination et relèvent de la garantie décennale (Civ, 3ème, 2 juillet 2002, n° 00-13.313).

 

Lorsque la défaillance d'un élément d'équipement, tel des lames de bardage, compromet l'étanchéité de l'ouvrage, elle rend cet ouvrage impropre à sa destination (Civ 3ème, 19 février 2002, n° 00-13.124).

 

Est cassé l'arrêt de cour d'appel, qui retient que les désordres affectant les capots des exutoires de fumée, lesquels sont des éléments d'équipement dissociables de l'ouvrage, ne relèvent que de la garantie de bon fonctionnement, sans rechercher si ces éléments d'équipement rendaient l'immeuble impropre à sa destination (Civ, 3ème, 12 juin 1991, n° 90-12.171, Publié) .

 

La responsabilité solidaire du fabricant d'un élément d'équipement (EPERS)

 

Aux termes de l'article 1792-4 du code civil, le fabricant d'un élément d'équipement « conçu et produit pour satisfaire, en état de service, à des exigences précises et déterminées à l'avance », est solidairement responsable des obligations de garantie légales mises à la charge du constructeur.

 

Toutefois, il faut encore que ce constructeur ait mis en œuvre cet élément d'équipement « sans modification et conformément aux règles édictées par le fabricant ». En langage judiciaire, ces éléments sont couramment désignés par l'acronyme EPERS, soit Éléments Pouvant Entraîner la Responsabilité Solidaire du fabricant.

 

La loi précise que sont assimilés à ce fabricant, l'importateur d'un élément d'équipement fabriqué à l'étranger, et celui qui a présenté cet élément d'équipement « comme son œuvre en faisant figurer sur lui son nom, sa marque ou tout autre signe distinctif ».

 

Les questions du champ de cette responsabilité solidaire et de la nature d'un EPERS se sont posées en jurisprudence.

 

La Cour de cassation a exprimé sa doctrine par un arrêt d'Assemblée plénière du 26 janvier 2007 (n° 06-12165, Publié) dont le sommaire est le suivant : « Ayant constaté d'une part, que des panneaux isothermes, commandés par le locateur d'ouvrage, avaient été fabriqués sur mesure, une fois leurs dimensions déterminées, afin de répondre à des exigences sanitaires et thermiques spécifiques, d'autre part, que les aménagements effectués sur le chantier étaient conformes aux prévisions et directives du locateur d'ouvrage, et que les panneaux, conçus et produits pour le bâtiment en cause, avaient été mis en œuvre sans modification, la cour d'appel en a exactement déduit que le fabricant était solidairement responsable des obligations mises à la charge du locateur d'ouvrage ».

En premier lieu, il convient donc, conformément à la lettre de la loi, de distinguer les équipements fabriqués en grande série et livrés tels quels sur le chantier, pour lesquels la responsabilité solidaire du fabricant est exclue, de ceux qui ont été soit adaptés soit spécialement fabriqués pour les besoins de ce chantier.

 

Ainsi, caractérise un EPERS, au sens de l'article 1792-4 du code civil, un plancher chauffant constituant un système de chauffage composé d'éléments qui ne sont pas des matériaux indifférenciés mais qui formait un ensemble élaboré, que l'entrepreneur met en œuvre sans modification et conformément aux règles édictées par le fabricant (Civ, 3ème, 25 juin 1997, n° 95-18.234, Publié).

 

De même, des stores techniquement élaborés et adaptés à la demande spécifique du constructeur, à partir d'un modèle de grande série, constituent des EPERS (Civ, 3ème, 16 novembre 2022, n° 21-20.016).

 

En revanche, il est jugé que ne relèvent pas des dispositions de l'article 1792-4 du code civil, des panneaux isolants, indifférenciés, produits en grande série et qui n'ont pas été fabriqués spécialement pour le chantier (Civ, 3ème, 7 janvier 2016, n°14-17.033 ; Civ, 3ème, 27 février 2008, n° 07-11.280, Publié).

 

De même, l'article 1792-4 du code civil ne peut pas s'appliquer à « des panneaux fabriqués pour constituer des entrepôts frigorifiques à température positive ou négative dont les longueurs variaient selon les demandes en fonction du chantier, dès lors que de tels panneaux sont proposés à la vente sur catalogue et ont vocation à assurer l'isolation de l'ouvrage dans lequel ils s'incorporent et qui peut être indifféremment une chambre froide, un entrepôt, un abattoir, une laiterie ou un tunnel de congélation » (Civ, 3ème, 15 mars 2006, n° 04-20.228, Publié). De même encore, ne sont pas des EPERS, « des carreaux constituant un matériau amorphe et indifférencié » (Civ, 3ème, 4 février 2004, n° 02-17.219, Publié).

En second lieu, pour que la responsabilité solidaire du fabricant de l'équipement puisse être retenue, cet équipement doit avoir été installé sur l'ouvrage dans le respect des préconisations du fabricant.

 

Le juge ne peut retenir qu'un équipement est bien un EPERS et que la responsabilité solidaire du fabricant est engagée, sans vérifier, si cela lui est demandé, que le constructeur avait mis en place cet équipement conformément aux directives du fabricant (Civ, 3ème, 17 juin 1998, n° 95-20.841, Publié).

 

Les délais pour agir sur le fondement de la garantie biennale

 

La garantie biennale peut être mobilisée contre le constructeur et, le cas échéant contre le fabricant solidaire, pendant le délai de deux ans à compter du jour de la réception de l'ouvrage. L'article 1792-3 du code civil précise que ce délai légal est minimal. Le contrat peut donc prévoir une durée plus longue.

 

Comme les délais de la garantie de parfait achèvement et celui de la garantie décennale, le délai biennal de l'article 1792-3 du code civil est un délai préfix ou de forclusion, qui, comme l'énonce l'article 2220 du code civil, n'est pas régi par les dispositions relatives à la prescription extinctive, ne peut pas être suspendu et n'est susceptible que d'interruption (notamment : Civ, 3ème, 16 mars 2023, n° 21-24.574).

 

Seule la demande en justice, même en référé aux fins d'expertise, interrompt le délai de la garantie légale (article 2241 du code civil ; Civ, 3ème, 17 mai 1995, n° 93-16.568, Publié). Les réclamations faites auprès du constructeur n'interrompent ni ne suspendent ce délai. Par principe, s'agissant d'un délai de forclusion, la reconnaissance de sa responsabilité par le constructeur n'interrompt pas le délai.

 

L'action en responsabilité contractuelle exercée par le maître de l'ouvrage contre le constructeur, est soumise au délai de dix ans de l'article 1792-4-3 du code civil. Ce délai est aussi un délai de forclusion (Civ, 3ème, 10 juin 2021, n° 20-16.837, Publié).

 

En revanche, les actions d'un constructeur contre un autre constructeur ou sous-traitant, ou celle d'un tiers contre le constructeur, sont soumis au délai de prescription de droit commun de cinq ans, courant à compter du jour où ont été connus, ou auraient dû être connus, les faits permettant d'exercer l'action (Civ, 3ème, 16 janvier 2020, n° 18-25.975, Publié).


Camille Terrier





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