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La garantie de parfait achèvement de l'article 1792-6 du code civil

  • camille7694
  • 14 août
  • 6 min de lecture
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Cette garantie légale et d'ordre public d'une année à compter de la réception de l'ouvrage couvre tous les désordres, malfaçons ou défauts de conformité, quelles que soient leur nature et leur gravité, qui sont :

 

Soit apparents et réservés sur procès-verbal par le maître de l'ouvrage au moment de la réception,

 

            Soit, lorsque ces désordres sont apparus après la réception, signalés par notification écrite au constructeur dans l'année qui suit la date de réception.

 

Les désordres apparents lors de la réception, mais non réservés, en sont évidemment exclus. Pour ceux-là, le maître de l'ouvrage n'a plus de recours, ni légal ni contractuel.

 

Le vendeur d'immeuble à construire ne peut être tenu de la garantie d'achèvement (Civ, 3ème, 30 mars 1994, n°92-17.225, Publié). Mais celui-ci bénéficie de cette garantie auprès du constructeur.

 

L'architecte ne sont pas débiteurs de la garantie d'achèvement.

 

De ce que cette garantie légale est d'ordre public, il découle que toute clause d'un contrat de construction qui viserait à l'exclure, serait réputée non écrite.

 

Attachée à l'immeuble, la garantie est transmise à l'acquéreur de l'immeuble, qui peut l'exercer dans les mêmes conditions que son vendeur.

 

1.  Les alinéas 2 à 6 de l'article 1792-6 du code civil encadrent étroitement l'exercice de cette garantie légale, en énonçant trois règles. Ces règles, qui sont les suivantes, n'épuisent pas la matière.

 

            Première règle : sur le constat de ces désordres lors de la réception des travaux, ou après leur dénonciation dans l'année qui suit au constructeur si ces désordres sont apparus après la réception, le maître de l'ouvrage et le constructeur doivent en principe s'accorder sur un délai d'exécution des travaux de reprise nécessaires. Les normes professionnelles applicables prévoient un délai de 60 jours pour conduire ces travaux à bonne fin.

 

            Deuxième règle : à défaut d'un tel accord, ou si cet accord n'a pas été respecté par le constructeur, le maître de l'ouvrage, après avoir adressé une sommation ou mise en demeure au constructeur, fait réaliser les travaux par un autre entrepreneur aux frais et risques de l'entrepreneur défaillant.

 

Cette manière de faire contraint le maître de l'ouvrage à préfinancer les travaux, sauf à lancer, le cas échéant un référé-provision et à prendre sur la retenue de garantie. Il devra assigner le débiteur de la garantie d'achèvement en règlement des travaux réalisés par l'entreprise tierce.

 

Il est possible d'agir sans délai en référé-expertise contre le constructeur fautif, plutôt que de rechercher un autre constructeur.

 

Mais il est jugé que, lorsque les désordres sont survenus après la réception, l'action judiciaire doit obligatoirement être précédée de la notification au constructeur de ces désordres, prévue à l'article 1792-6, alinéa 2, du code civil.

 

Autrement dit, une assignation, même délivrée dans le délai d'une année, ne peut se substituer à la formalité de la notification au constructeur des désordres révélés postérieurement à la réception, qui est préalable (Civ, 3ème, 13 juillet 2023, n° 22-17.010, Publié ; Civ, 3ème, 15 avril 2021, n° 19-25.748, Publié). Sur la forme de cette notification, il n'existe pas de prescriptions particulières, mais on se doute que la lettre recommandée avec demande d'accusé de réception est une nécessité.

 

            Troisième règle : si l'on suit la chronologie légale, la bonne exécution des travaux est constatée d'un commun accord ou, à défaut, judiciairement, par exemple lorsque le constructeur entend percevoir le solde du marché au motif que les travaux de reprise ont été menés à bien. Elle met fin à la garantie.

 

            Quatrième règle : aux termes de cet article 1792-6, la garantie légale de parfait achèvement ne peut être mise en œuvre pour remédier aux effets de l'usure normale ou de l'usage. En outre, comme prescrit au 2ème alinéa de l'article 1792 pour toutes les garanties légales, la cause étrangère est exonératoire pour le constructeur.

 

2.  L'article L124-4 (anciennement : L111-11) du code de la construction et de l'urbanisme, selon lequel les contrats de construction sont toujours réputés contenir les prescriptions légales ou réglementaires relatives aux exigences minimales requises en matière d'isolation phonique, dispose que les travaux répondant à ces exigences relèvent de la garantie de parfait achèvement de l'article 1792-6 du code civil.

 

Il résulte de ce texte, ce que la jurisprudence confirme, que l'insuffisance de l'isolation phonique rend l'immeuble impropre à sa destination (par exemple : Civ, 3ème, 23 septembre 2020, n° 19-10.282).

 

3.  L'assignation sur le fondement de la garantie d'achèvement doit toujours intervenir dans le délai d'une année de la réception, sous peine de forclusion (Civ, 3ème, 15 janvier 1997, n° 95-10.097, Publié ; Civ, 3ème, 29 mars 1998, n° 17-15.549 ; Civ, 3ème, 18 décembre 2001, n° 00-15.481).

 

Le délai légal d'une année est donc tout à la fois, selon la jurisprudence, un délai de constatation des désordres et un délai pour agir judiciairement contre l'auteur de ces désordres, le cas échéant en référé expertise. Il ne suffit pas de notifier au constructeur dans le délai d'une année les réserves incluses dans le procès-verbal de réception (Civ, 3ème,  6 mai 1998, n° 96-18.038, Publié).

 

4. La garantie légale de parfait achèvement ne vise qu'une réparation en nature consistant en la réalisation des travaux de reprise.

 

A la différence des autres garanties légales en matière de construction, la garantie de parfait achèvement n'est pas exclusive. Le maître de l'ouvrage peut faire le choix, pour les malfaçons et défaut de conformité réservés lors de la réception, ou apparus et notifiés dans l'année qui suit,

 

            Soit de mettre en œuvre une autre garantie légale, telle la garantie décennale (Civ, 3ème, 4 février 1987, n° 85-16.584, Publié), mais seulement lorsque les désordres ont apparus dans l'année suivant la réception ; en effet, les désordres faisant l'objet de réserves lors de la réception ne relèvent pas de la garantie décennale (Civ, 3ème, 17 juillet 1992, n° 90-14.367, Publié) ; il faut encore que les désordres présentent les caractères de gravité d'un désordre décennal, c'est à dire qu'ils portent atteinte à la solidité de l'ouvrage ou le rendent impropre à sa destination.

 

            Soit d'engager une action en responsabilité contractuelle de droit commun pour faute prouvée, de manière à obtenir une réparation sous forme de dommages et intérêts, plutôt qu'en nature. En effet, l'obligation de résultat du constructeur persiste pour les désordres réservés jusqu'à la levée des réserves (par exemple : Civ, 3ème, 13 décembre 1995, n° 92-11.637, Publié ; Civ, 3ème, 30 juin 2009, n° 08-18.410 ; Civ, 3ème, 2 février 2017, n°15-29.420, Publié ; Civ, 3ème, 12 novembre 2020, n° 19-22.304) et cela même si la réception de travaux, avec ou sans réserves met fin au contrat d'entreprise entre le constructeur et le maître de l'ouvrage.

 

Il en est ainsi, même si la mise en œuvre de la responsabilité contractuelle n'est pas intervenue dans le délai d'une année de la garantie de parfait achèvement (Civ, 3ème, 27 janvier 2010, n° 08-21.085, Publié).

 

Mais les désordres doivent avoir été réservés lors de la réception des travaux (Civ, 3ème, 7 mars 2019, n°18-11.583).

 

5.  Comme les délais de deux ans pour la garantie de bon fonctionnement et le délai de la garantie décennale, le délai d'une année de l'article 1792-6 du code civil est un délai préfix ou de forclusion, qui, comme l'énonce l'article 2220 du code civil sans pourtant définir cette nature de délai, n'est pas régi par les dispositions relatives à la prescription extinctive, ne peut pas être suspendu et n'est susceptible que d'interruption (notamment : Civ, 3ème, 16 mars 2023, n° 21-24.574).

 

La demande en justice, même en référé aux fins d'expertise, interrompt le délai d'une année de la garantie légale (article 2241 du code civil ; Civ, 3ème, 17 mai 1995, n° 93-16.568, Publié). De même, interrompt ce délai toute mesure conservatoire prise en application du code des procédures civiles d'exécution, ainsi qu’un acte d'exécution forcée (article 2244 du même code). En revanche, les réclamations faites auprès du constructeur n'interrompent ni ne suspendent ce délai.

 

Par principe, s'agissant d'un délai de forclusion, la reconnaissance de sa responsabilité par le constructeur n'interrompt pas le délai.

 

L'action en responsabilité contractuelle, exercée concurremment à la garantie légale, est soumise au délai de dix ans de l'article 1792-4-3 du code civil (Civ, 3ème, 7 mars 2019, n° 18-11.583). Ce délai est aussi un délai de forclusion (Civ, 3ème, 10 juin 2021, n° 20-16.837, Publié).


Camille Terrier


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